LE MUR DES JUSTES

 

        Combat de l’Enfant Caché asbl

pour l’érection d’un monument en leur honneur

au Mémorial national à Anderlecht

 

 

EC INFOS

N° Décembre 2018

Editorial

Semper vivat

Chaque organisation se pose toujours la question de son avenir.

Cela revient à se demander la raison de son existence. Certes notre asbl a connu à un moment donné 1.350 membres et un rayonnement incomparable. Mais aujourd’hui, les buts qu’elle s’était assignés à sa création demeurent.

Obtenir les mêmes droits pour tous les enfants cachés, ce qui n’est toujours pas acquis en Flandre, où se pratique une discrimination anticonstitutionnelle.

Lutter contre l’antisémitisme, ce que nous continuons à faire, notamment par nos témoignages live dans les écoles, où la valeur pédagogique de survivants est irremplaçable. Il est important que les jeunes se rendent compte que les Juifs si décriés, pour ne pas dire haïs, sont là devant eux des personnes au sens plein du terme, des êtres comme eux auxquels ils peuvent s'identifier.

Favoriser la solidarité entre les membres, ce que nous poursuivons en organisant de nouveau des groupes de paroles pour répondre aux interrogations ou difficultés actuelles liées par exemple au nouvel antisémitisme ou autre.

Rendre hommage à nos sauveurs, en l’occurrence en plaidant vivement pour l’instauration d’un Mur des Justes par un Comité national au lieu consacré du Mémorial à Anderlecht.

En somme, faire œuvre de mémoire, ce nous accomplissons en publiant enfin un livre d’études sur L’Enfant caché, illustré de récits de vie et d’un album célébrant nos sauveurs juifs et non-juifs. L’ouvrage résume toute l’action réalisée et celle à poursuivre, pour que vive encore longtemps, - ce que chacun de nous fut et reste en lui-même, - l’Enfant sauvé.

Oui, L’Enfant caché a encore beaucoup à faire. Et c’est sa raison d’être.

Survivant veut peut-être dire que nous avons à vivre plus longtemps que les autres.

Adolphe Nysenholc


Dossier

MUR DES JUSTES

L’Enfant Caché-asbl et les Justes

L’Enfant Caché-asbl représente les enfants qui  ont été sauvés grâce à des personnes généreuses. Il y a un lien naturel entre eux et leurs sauveurs.

C’est inscrit dans les statuts publiés dans le Moniteur du 25 mars 1993 qu’un des « buts » de l’Association et de ses membres est d' :

« Exprimer leur reconnaissance à leurs concitoyens non-juifs qui, au péril de leur vie et de leur liberté, ont sauvé des enfants juifs et veiller à leur promotion comme « Justes parmi les Nations » par l’Institut commémoratif des Martyrs et Héros Yad Vashem à Jérusalem. »

Et notre association n’a pas cessé de poursuivre cet objectif.

En effet, si les noms des 1.746 Justes existent, c’est en très grande partie grâce à l’action de L’Enfant Caché-asbl qui a encouragé ses membres à introduire des demandes, les a aidés à remplir les dossiers exigés par le Yad Vashem, à honorer continuellement les Justes en étant présente aux cérémonies de remise des diplômes aux quatre coins du pays, en publiant régulièrement dans son EC Infos des articles à leur sujet, en honorant leur mémoire dans son Exposition itinérante par de très nombreux documents, en composant un livre à paraître bientôt dans la prestigieuse « Collection Mosaïque » de l’Institut d’Etudes du Judaïsme, intitulé L’Enfant sauvé, qui constitue un nouvel hommage que nous leur rendons, et last but not least : en ayant maintenu un contact perpétuel et personnalisé avec la grande partie de ces Justes quand nous étions 1.350 membres cotisants et que nous continuons à garder avec pas mal de leurs descendants.

Il est temps que soit rendu à ces héros un hommage national.

Aussi après le combat pour le statut de l’enfant caché et pour les droits y afférents, nous plaidons, aujourd’hui comme hier, pour qu’un Mur des Justes soit édifié au Square des Martyrs Juifs à Anderlecht. 

Faire l’économie de l’avis de L’Enfant Caché et de son action ne serait pas juste. Et c’est ce que reconnaissent déjà d’autres organismes de la mémoire :

En tout cas, un des buts de notre association (cf. le Moniteur, ibid.) est d’

« Accomplir tous actes se rapportant directement ou indirectement à son objet et notamment s’associer à toute organisation belge ou de toute autre nationalité, ayant des objectifs similaires. »

Aussi, nous prenons nos responsabilités en ouvrant un dialogue pour faire aboutir le projet dans la sérénité.

Le Mur engage la collectivité. Et la majorité doit pouvoir se reconnaître dans le projet. Si le Mur n’est pas soutenu par l’opinion générale et suscite des controverses, comme parfois la pose des pavés,  on va dans le mur. Il nous paraît que les CCIB, CCOJB et FJO, organes au-dessus de la mêlée, doivent patronner le projet.

 

Un lieu national

Le square mémoriel d’Anderlecht attend ce Mur depuis toujours.

Le lieu est hautement symbolique. Il s’impose qu’on rende aux Justes les honneurs à cet endroit en y gravant leurs noms dans le marbre, d’autant plus que c’était déjà le vœu des fondateurs du Mémorial d’Anderlecht (cf. Marc Goldberg en 1966) [1]. Dans leur esprit, il devait compléter le mur des déportés et la stèle des Résistants armés juifs.

Les Justes ont sauvé les enfants des déportés : leur place est à leur côté.


[1] Voir l’étude de Daniel Weyssow, "Le Mémorial national aux Martyrs juifs de Belgique entre histoire, mémoire et avenir", Mémoire d'Auschwitz asbl, décembre 2017, www.auschwitz.be

 


C’est le lieu idéal, institué, où se font les cérémonies d’hommage nationales d’anniversaire. C’est le lieu naturel où les familles des Juifs et des Sauveurs de tout le pays pourraient venir se recueillir en leur mémoire.

Et c’est l’avis du CA qui gère ce lieu.

 

Un lieu de rassemblement

Le Mur des déportés à Anderlecht a été l’œuvre de l’Union des Déportés Juifs de Belgique [2] en toute collaboration avec le Judaïsme anversois qui a apporté une grande partie du financement. Ainsi, cette association, dont le président charismatique et regretté Maurice Pioro n’a jamais heurté qui que ce soit, a réussi à créer, avec Joseph Komkommer et Claude Marinower, un consensus tel que le Mémorial à Anderlecht est reconnu, du Nord au Sud du pays, comme un haut lieu symbolique national de la vie juive belge.

Et il faut rappeler que cette association a été prise en relais par les Fils et Filles de la Déportation, avec comme présidente, Sophie Rechtman, laquelle deviendra la présidente fondatrice de l’Enfant Caché-Het Ondergedooken Kind, auquel elle a consacré toute sa vie.

Si Sophie avait encore été en vie, le Mur, auquel elle a toujours rêvé, aurait été son œuvre et elle l’aurait installé au Mémorial National aux Martyrs Juifs de Belgique, comme prolongement naturel de son action avec Maurice Pioro, et d’autant plus qu’à l’entrée du Monument est érigée la stèle des Résistants armés juifs.

Or, les Justes parmi les nations furent à leur manière, par leur désobéissance civile courageuse et héroïque, des résistants à l’occupant nazi en cachant des enfants qu’ils ont soustrait à la déportation et à une mort certaine.

Nous voulons que l’opération du Mur  réussisse et pour cela il s’agit de prendre en considération tous les enjeux du problème pour trouver la meilleure solution. L’option idéale serait que tout le monde qui le désire y collabore, mais ne devrait pas être une seule association sans tout le monde.

Ad. Ny

[2] La proposition a été lancée à l’occasion d’une réunion de l’Union des Déportés Juifs de Belgique en 1961 (Cf. D Weyssow, article, Mémoire d’Auschwitz, déc. 2017)


 

Des Associations pour le Mur des Justes

"Présence Juive pour la mémoire" fédère les 3 associations traditionnelles de la mémoire : les déportés, les résistants, les enfants cachés.

Et, afin de donner à la réalisation du projet d’un Mur des Justes toute la dimension qui devrait lui revenir, cet organe, auquel se sont joints Forum d’Anvers et le CA du Mémorial à Anderlecht, pense qu’il serait judicieux de prendre les initiatives suivantes :

- Former un COMITE NATIONAL DE LA COMMUNAUTE JUIVE DE BELGIQUE RECONNAISSANTE A LEURS SAUVEURS  RECONNUS JUSTES PARMI LES NATIONS.

Il est évident que les associations faîtières de notre communauté en feraient partie (CCIB, CCOJB, Forum) ainsi que les associations patriotiques juives directement concernées (comme celles regroupées dans Présence Juive pour la Mémoire) et aussi la Section belge du Yad Vashem, et le Comité du Mémorial national des Martyrs et héros, le CCLJ, UPJB, AMS, pour ne citer qu’elles, parmi la quarantaine d’associations possibles. Que ceux qui veulent travailler au projet se portent candidats.

Le processus a déjà fait ses preuves par le passé (action en faveur des Juifs soviétiques, hommage des Juifs de Belgique à leurs héros et sauveurs, commission nationale pour la restitution).

Si les stolpersteine, pavés de mémoire sont une affaire individuelle (un choix purement personnel, mais qui n’a pas l’assentiment de tout le monde), le Mur des Justes est une affaire collective. Ce projet nous semble devoir avoir un assentiment large de la Communauté juive ;

 -   Associer un comité d’honneur composé de hautes personnalités des mondes politique démocratique, académique, religieux et laïque, patriotique. Ceci permettrait d’impliquer publiquement et largement la société belge dans le processus de souvenir, l’un des piliers de notre démocratie. Si quelques politiques estiment intéressant de rééditer « Mein Kampf » dans un but éducatif, il est tout aussi important que de hautes personnalités politiques de notre pays honorent leurs citoyens qui ont résisté et sauvé tant de vies échappé à la Shoah. Accorder leur intérêt, leur soutien et leur participation à un tel projet les honorera à leur tour.

- Lancer une souscription pour financer le Mur,  la gravure des noms, la publication d’un ouvrage reprenant les noms et les actions  des Justes de Belgique.

- Plaider pour que l’implantation de ce Mur ait lieu sur le site du Mémorial aux Martyrs Juifs de Belgique à Anderlecht (classé au patrimoine national).

Le projet d’un tel Mur fut déjà énoncé dès le départ par les responsables du Mémorial d’Anderlecht. Dans leur esprit, il devait compléter le mur des déportés et la stèle des Résistants armés juifs.

D’ores et déjà 6 associations de la Communauté juive plaident pour l’édification d’un Mur des Justes au Square des Martyrs Juifs à Anderlecht. Pour que le Mur soit l’expression de la Communauté. Pour qu’il soit au-dessus des partis et des groupements. Pour qu’il soit à la hauteur des Justes.

Présence Juive pour la Mémoire (PJM),

Union des Déportés Juifs en Belgique-Filles et Fils de la Déportation (UDJB) - Vereniging van de Joodse Weggevoerden in België

Continuité de l’Union des Résistants Juifs de Belgique (CURJB),

L’Enfant caché-Het Ondergedoken Kind (EC-HOK),

Forum der Joodse Organisaties (FJO)

Le Mémorial National aux Martyrs Juifs de Belgique

* Voir EC Infos de septembre 2018.

 


Nouvelles du Mémorial 

février 2020

 

Ci-dessous, la représentation en infographie de la rénovation des abords du Mémorial. L’entrée se trouve à gauche sous les arbres, à l’endroit du n°7.

Mémorial
 

1. Haie hexagonale 

2. Dégagement des murs 

3. Nouveau chemin 

4. Nouveau mur de béton 

5. Nouvel emplacement du Monument aux Résistants 

6. Emplacement du futur Monument aux Justes 

7. Nouvelle grille 

8. Réaménagement des abords du Mémorial

 

Le Mur des Justes

 « En 1972, deux commissions nationales sont créées pour concevoir un monument en hommage aux Résistants juifs et un hommage aux Justes parmi les Nations (non-juifs qui ont risqué leur vie pour venir en aide aux Juifs). Le Monument aux Résistants juifs présente les noms de 245 héros juifs de Belgique tombés dans la résistance à l’occupant nazi, il est inauguré le 6 mai 1979. Le Mémorial est classé en 2003. Le Mur des Justes sera édifié dans le cadre du futur projet de réaménagement de l’îlot Albert mené par Beliris en 2021. »

(in website  du Mémorial national aux Martyrs et Héros Juifs à Anderlecht)

 


 

Pour un parcours mémoriel

Justes

qui ont sauvé chacun de nombreux enfants

(à proposer pour qu’on les honore, notamment d’une plaque commémorative ou par une cérémonie d’anniversaire qui permettrait de rappeler leur action de sauvetage)

La Reine Elizabeth

Yvonne Nèvejean (Directrice de l'ONE) vient d'avoir une rue inaugurée à son nom (à Laeken) ce 27 novembre 2019. Dans un an, on pourrait tenir une cérémonie d'anniversaire et au moins rappeler son rôle.

L'Abbé André (Namur) (a déjà une place dédiée à son nom. Idem) Cf. un roman , une BD, un documentaire, qui lui sont consacrés. Mais a-t-il une plaque commémorative ?

Max  Albert van den Berg  a déjà son monument, à Liège, lequel pourrait donner lieu à une cérémonie d’anniversaire.

Madeleine Sorel (directrice durant la guerre au château de Branchon) : des personnes de Fernelmont se sont déclarées intéressées pour faire aboutir le projet d'une plaque à sa mémoire…

Bruno Reynders : "En 1991, un square en son honneur fut inauguré à Ottignies. Il comporte une stèle où l'on peut lire : « Père Bruno Reynders, Bénédictin (1903-1981). Héros de la résistance, au péril de sa vie, il sauva 400 juifs de la barbarie nazie » https://fr.wikipedia.org/wiki/Ottignies  

Andrée Geulen  (a connu de nombreux honneurs, mais pas de plaque commémorative, sauf erreur)

Renée Jacqmotte ("Une cérémonie eut lieu au cimetière de Blocry  le 8  mai pour honorer sa mémoire. Une plaque commémorative fut apposée sur sa tombe à cette occasion") https://fr.wikipedia.org/wiki/Bois_de_Lauzelle

Jeanne Daman-Saglione (2.000 enfants juifs sauvés par ses soins…)

Marie Taquet (Jamoigne)   [une commémoration a eu lieu au château du Faing à Jamoigne en sept. 2018, avec spectacle et parcours mémoriel. Mais une plaque pourrait rappeler l'action de Marie Taquet la Juste ?)

Odile Henri et Remy Ovart  (cf. pavés de mémoire, Woluwé)

"Brigitte" Moons (Suzanne Moons-Lepetit, du CDJ)

Solange (Paule Renard)

Les Princes de Ligne (Beloeil)

(à compléter)

Nombre d’entre eux ont leur nom inscrit dans l’espace public, voire un monument.

Nous nous demandons si à partir d'eux, il n'y aurait pas moyen de construire un parcours mémoriel spécifique, ou si l’on ne pourrait pas les intégrer dans un parcours mémoriel général, dont le point d’orgue serait le Mur des Justes au Mémorial National aux Martyrs et Héros Juifs (Anderlecht).

Pour des renseignements complémentaires sur eux, on peut consulter aussi L'Enfant sauvé (2019, Ed. Devillez), pp. 179-186.